Chapitre seizième (l'arrondi se ment.)
Cindy se coiffait, bouche bée, d'une main gauche peu adroite. Elle manqua de dextérité ; la « chose », rendue glissante par son séjour aquatique, lui échappa. Curiosité et Stupéfaction lui firent oublier le temps, l'espace, et le spa. Faisant fi de son souci capillaire, elle plongea son bras rond et nacré jusqu'à mouiller le gracieux duvet doré de sa nuque. A tâtons, elle cherchait le bâton.... à ce qu'il lui avait semblé.
Ses amis, interloqués, se penchèrent simultanément, partant en quête, eux aussi, de ce qui semblait tant la captiver.
Un gloussement de Steve lui signala que ce qu'elle tenait fermement lui appartenait... Il se tortillait.... « Mon astre, lâche donc mon gros orteil ! ». Non.... non, ce qu'elle avait attrapé était plus long, moins souple et surtout veiné....
Sa main poursuivait son parcours aqueux. Ah, une cordelette... son majeur et son index s'emmêlèrent, elle tira brusquement pour dégager sa main.
Une crispation soudaine d'Amadou lui fit comprendre qu'elle venait de l'effleurer aussi... à moins que ce ne fût Connie ou Steve puisque tous farfouillaient à présent. A cette idée, son ressentiment envers Steve refit surface. Simulant, avec un gémissement, une perte d'équilibre soudaine, sa main gauche agrippa fermement les cheveux de son esthéticien et, de toutes ses forces, décuplées par l'amertume et la jalousie, elle lui enfonça brutalement la tête dans le bain bouillonnant. En cet instant, elle surprit le regard interrogatif d'Amadou, et admiratif de Connie. Ou peut-être était-ce l'inverse. Ses cheveux en bataille l'auréolaient telle une amazone déchaînée, un archange vengeur, Amphitrite jaillie d'un océan parfumé et mouvant. L'image était saisissante, excitante, captivante. Consciente de cette révélation et du risque d'accusation d'homocide, elle libéra Steve qui, pantelant, étouffant, crachotant, se mit à geindre et pleurnicher. Il était pathétique. Sa vengeance consommée, elle reprit ses explorations, caressant le fond du bout de ses doigts agiles.
AH ! Enfin !
Avec un petit cri de satisfaction
(pour ne pas choquer les autres usagers), elle brandit triomphalement l'objet de ses explorations.... et son cri s'étouffa dans sa gorge ! Les yeux écarquillés, les cheveux dressés, les joues empourprées ! C'était un.... non..... ! C'était un..... Seigneur ! …. C'était un...... jamais elle n'aurait imaginé trouver un..... bref, un..... son éducation stricte l'empêchait de formuler précisément ce dont il s'agissait. Les gens étaient ignobles ! Oser utiliser et surtout abandonner un.... ici ! Malgré les désinfectants puissants, le risque était énorme. Comment avait-il échappé à la vigilance du personnel ? Peut-être enfilé dans le cône du siphon, aspiré par la bouche vorace d'évacuation....
« Un olisbos ! Comme c'est amusant ! »
La voix et le rire de Connie lui parvinrent à travers un brouillard sonore et cotonneux.
D'un geste ample, dégoûté, et terriblement sensuel, elle jeta la chose sur le carrelage et entreprit de se redresser pour sortir de ce jacuzzi. Les usagers des appareils voisins commentaient à voix basse la découverte. L'instant était confus. Son pied dérapa soudain et, ses bras battant l'air vainement, elle vit venir la fin de son brushing parfait et du magnifique reflet blond et mêché, bien qu'elle n'ait bu aucun alcool. Elle perçut le mouvement vif d'Amadou qui s'était dressé pour l'attraper. Avec gratitude, elle atterrit confortablement dans ses bras musclés. Au même moment, Steve se mit à suffoquer, les yeux exorbités. Connie laissa filer un sifflement appréciateur. Et la rumeur enfla brutalement. Ses yeux suivant ceux de son amie, elle se raidit puis se sentit mollir. La cordelette qui retenait le maillot de son sauveur était dénouée, libérant la pièce textile... et son contenu.
Connie avait en tête un ancien adage tahitien : «
Te pāhonoraa o te piri i tuuhia e au teie ia Taata haere tātu'etu'e, o vai au »
(quand tout ne tient qu'à une corde, évite de t'y prendre les pieds).