Je viens de trouver quelque chose qui pourrait nous éclairer :
Le défaut de paiement d'un pays en quatre questions
Certains n'en redoutent encore que les effets, mais d'autres sont déjà en plein dedans. De nombreux pays gèrent en simultanée crise sanitaire et crise économique, comme l'Argentine qui a annoncé mardi reporter à l'année prochaine le paiement de sa dette, soit près de 10 milliards de dollars. Coincée entre la nécessité d'affronter l'épidémie - et donc accroître sa dépense publique - et honorer ses engagements, l'Argentine risque le défaut de paiement.
Et l’État sud-américain est loin d'être un cas isolé. Une série de pays émergents se retrouvent dans la même situation, après des années de surendettement. Certains demandent déjà à leurs créanciers de rééchelonner leurs dettes, d'autres vont jusqu'à demander une annulation en partie. Mais qu'est-ce qu'il se passe lorsqu'un pays ne peut plus honorer ses engagements, lorsqu'il est en défaut de paiement ? CQFD fait le point.
1. Qu'est-ce qu'un défaut de paiement ?
On dit d'une entité - pays ou entreprise - qu'elle « entre en défaut de paiement ». C'est-à-dire qu'elle ne peut plus payer ce qu'elle doit à ses créanciers. Cela concerne à la fois le capital et les intérêts de sa dette. Quand il s'agit d'un pays, il existe trois types de dettes : obligataire - l’État a emprunté sur les marchés ; bancaire ; ou « institutionnelle », lorsque le pays a reçu un prêt d'une institution internationale comme le Fonds monétaire international.
Un pays peut donc se retrouver en défaut de paiement vis-à-vis de ces trois acteurs. Dans la crise de la dette latino-américaine des années 1980 par exemple, les États s'étaient surendettés auprès de banques. Par contre, il y a trois ans, le Venezuela a échoué à rembourser un autre type d'emprunt, à savoir 200 millions de dollars (170 millions d'euros) de coupons d'obligations - ces fameux titres qu'un pays émet sur les marchés pour financer son déficit.
Il faut aussi distinguer les situations de défaut de paiement qui peuvent être très différentes. « On parle du remboursement des dettes mais il y a parfois des pays qui n'ont juste plus aucun argent dans leurs caisses, ne serait-ce que pour acheter des médicaments ou des produits alimentaires », explique Anton Brender, directeur des Etudes économiques de Candriam Investors Group. La gestion se fait donc au cas par cas.
Toutefois, « le défaut de paiement total est quand même très rare », rassure Anton Brender. Car tout est fait pour que l’État ne fasse pas faillite. D'autant que si un pays fait faillite, il ne peut pas être mis en liquidation comme le serait une entreprise « parce qu'une entreprise peut cesser d'exister, un État non et c'est ça la différence fondamentale », renchérit Gilbert Cette, économiste français, ancien membre du Conseil d'analyse économique.
2. Qui décide si un pays est en défaut de paiement ?
Il existe plusieurs options. La première : l’État lui-même. Il peut par exemple se déclarer en défaut de paiement en annonçant qu'il ne peut plus honorer ses échéances de dette. C'est ce qu'a fait le Liban, le 9 mars dernier, étouffant sous une dette de 92 milliards de dollars, soit environ 170 % de son PIB. Il n'a pu payer le 1,2 milliard d'eurobonds - des bons du Trésor émis par l’État - qu'il devait. La Russie, en 1998, et l'Argentine, en 2001, se sont également retrouvées dans cette situation après avoir annoncé des moratoires sur leurs dettes.
Une agence de notation peut aussi officialiser un défaut de paiement. Car ce sont elles qui évaluent la solvabilité de chaque pays, en notant leurs obligations, « de façon à ce que les investisseurs aient une vraie idée du crédit du pays », précise Anton Brender. En 2017, SP Global Ratings a ainsi classé le Venezuela en « défaut partiel » sur sa dette après avoir constaté son incapacité à rembourser les 200 millions de dollars de coupons d'obligations.
Enfin, le défaut peut aussi être le fait de l'agence américaine ISDA, qui régit les CDS, sorte d'assurance contre le défaut d'un pays ou d'une entreprise. Ou d'un créancier privé, révélant qu'un État a cessé de le rembourser, ce qui aura toutefois moins d'impact.
3. Quelles sont les conséquences financières ?
Un défaut de paiement coupe automatiquement l'Etat des marchés financiers sur lesquels il ne peut plus emprunter. Pour récupérer du cash, le pays a alors la possibilité de se tourner vers les institutions internationales, comme le FMI, qui peut lancer un plan de sauvetage.
Des sanctions internationales peuvent également être décidées à l'encontre de l’État en faillite. Entre autres, des représailles commerciales ou des mesures de rétorsion économique que certains pays peuvent adopter pour indemniser leurs ressortissants lésés. Les créanciers ont effectivement, en théorie, le droit de saisir les actifs du pays à l'étranger.
Enfin, le pays en difficulté a de grands risques de voir sa réputation ternie et d'être considéré comme un mauvais payeur. Ce qui peut fortement compromettre son retour sur les marchés pour quelques années. L'Argentine, par exemple, a mis quinze ans pour pouvoir y revenir. « Et elle emprunte nettement plus cher puisqu'elle n'inspire plus du tout confiance, ce qui est une catastrophe », commente Anton Brender.
4. Comment se déroule la restructuration d'une dette ?
« Être en défaut de paiement c'est ne pas pouvoir honorer ses dettes comme il est prévu dans les contrats, c'est-à-dire en respectant une échéance précise et un montant », rappelle Gilbert Cette. Donc le pays peut revoir avec son créancier l'échéancier ou le montant de sa dette pour revenir dans les clous.
C'est ce qu'on appelle restructurer une dette. Les remboursements sont rééchelonnés et certaines créances sont même effacées. « C'est d'ailleurs l'intérêt du prêteur, parce qu'il n'y a rien de pire pour lui qu'un pays qui lui fasse défaut complètement », explique Anton Brender. Exemple : la Grèce, dont on a restructuré la dette après la crise financière de 2008 en en annulant une partie.
Ce type d'opérations peut aussi attirer des fonds vautours voulant profiter de la situation de faiblesse de l’État pour obtenir des taux élevés ou lancer des procédures judiciaires.
CQFD - Les Echos