Extraits du discours sur les passions de l'amour - Blaise Pascal
Bien trouver la vérité dont on parle, c’est en cela que consiste la force des preuves de ce que je dis. Quand un homme est délicat en quelque endroit de son esprit il l’est en amour car comme il doit être ébranlé par quelque objet qui est hors de lui, s’il y a quelque chose qui répugne à ses idées il s’en aperçoit et il le fuit. La règle de cette délicatesse dépend d’une raison pure, noble et sublime. Ainsi, on peut croire que l’on est délicat sans l’être effectivement….
On a beau se cacher, l’on aime toujours, dans les choses mêmes où il semble que l’on ait séparé l’amour, il s’y trouve secrètement et en cachette, mais il n’est pas possible que l’homme vive sans cela.
Un plaisir vrai ou faux peut remplir également l'esprit. Car qu'importe que ce plaisir soit faux, pourvu que l'on soit persuadé qu'il est vrai ?
L'Homme est né pour penser ; aussi n'est-il pas un moment sans le faire ; mais les pensées pures, qui le rendront heureux s'il pouvait toujours les soutenir, le fatiguent et l'abattent. C'est une vie unie à laquelle il ne peut s'accommoder ; il lui faut du remuement et de l'action, c'est-à-dire qu'il est nécessaire qu'il soit quelquefois agité des passions, dont il sent dans son cœur des sources si vives et si profondes.
En amour un silence vaut mieux qu'un langage. Il est bon d'être interdit ; il y a une éloquence de silence qui pénètre plus que la langue ne saurait le faire.
Si loin que nous allions en amour, on ne songe pas que l’on a besoin d’autre chose que ce que l’on aime, l’esprit est plein et il n’y a plus de place ni pour le choix, ni pour l’inquiétude, la passion ne peut pas être sans excès.
CONSEQUENCE