DeletedUser51060
Guest
Bonjour bonjour ^^ je m'ennuyais un peu, alors j'ai décidé de commencer à écrire une histoire. J'ai fait ce premier chapitre en une semaine et demi, et c'était la première fois que j'écrivais réellement soyez indulgents. N'hésitez pas à me signaler toutes les fautes/incohérences, et bonne lecture
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Chapitre 1
On raconte que jadis, bien avant d'être telle que nous la connaissons aujourd'hui, la Tour des Mille Soupirs était le fief d'une race puissante, des créatures immenses, de notre point de vue, mais néanmoins très évolués. Hauts de cinq mètres selon les uns - hypothèse fort plausible au vu de la taille de leurs constructions - changeformes selon d'autres, capables de contrôler les forces de la nature... leur existence est entourée de mystères. Ces créatures imposantes, nommées les Skandium, seraient également, selon des sources malheureusement imprécises, les bâtisseurs de la capitale du monde civilisé : Jadiel, la cité de cristal. Hélas, à ce jour aucune preuve tangible de l'existence des Skandium n'a été trouvée, à l'exception des constructions démesurées qu'ils ont dispersées au travers des Îles Célestes.
Histoire du Monde, Atascus Mireorbis, cycle 5237 A.E.
"Loin d'ici, dans la contrée reculée de Merthan, terre oubliée des hommes comme des dieux, repose un secret. Au sein des hautes montagnes orifères de l'Aesthis, dans la plus profonde et obscure des grottes, un être est assis dans la posture rituelle de méditation des Mages, un bâton noueux semblable à un serpent dressé devant lui dispense une faible lueur, seule source lumineuse dans la grotte. Le seul bruit de la salle provient de la chute régulière de gouttes d'eau depuis un stalagtite, juste devant l'être androgyne. Son immobilité est d'ailleurs si totale, sa poitrine se soulève d'une manière si imperceptible que l'on pourrait le prendre pour une statue. Puis, dans un mouvement d'une lenteur et d'une fluidité si contrôlée, qu'on ne saurait trouver chez un être humain, il parait reprendre vie, se redressant en position levée, les yeux sans pupilles fixant un point connu de lui seul. La bouche légèrement entrouverte laisse échapper un souffle, qui se mue en tempête, tournoyant dans la pièce, tourbillonant dans la quête d'une sortie.
Les Mots de la créature finissent par trouver une fissure, tout juste assez large pour les laisser passer, remonter et se répandre dans toute l'immensité du Void, chevauchant les courants aériens. Rapidement, ils arrivent aux Îles Célestes, se répandent dans chaque foyer, chaque demeure acceuillant une personne un tant soit peu réceptive à l'Ancienne Magie. Personne, fût-il roi, paysan ou bien mage, ne peut se soustraire à la somnolence puissante qui les envahit soudain. Alors, Il commence à parler.
"Entendez, enfants d'Elendatryl, la voix du Conteur. Entendez la voix de la vérité, la voix de l'Histoire. Il est temps pour vous d'accéder à la connaissance."
"Il y a fort longtemps, bien avant l'Exode, bien avant même que le monde, du moins tel que vous le connaissez ne soit créé, était le Void. Le Void était tout, partout, tout le temps, et il n'existait rien d'autre que lui. Le mal et le bien n'existait pas, car ils ne sont pas Void. Et de ce Void, d'elles-mêmes, surgirent deux forces. Elles n'étaient que pensée, concept, sans aucune existence physique : Avako 'sh, principe d'obscurité, et Fôlhein, principe de lumière. Ni mâle, ni femelle, ni frère, ni sœur, simples contrepoints." Il se tait un instant, dans un silence d'autant plus impressionnant que lorsqu'il parle, sa voix emplissait l'espace et vous donne l'impression d'être assis au coin du feu, un bon livre dans les mains.
"Dans un premier temps, ils se satisfirent de la contemplation du Void et de la découverte de leurs pleines capacités intellectuelles. Mais, au fur et à mesure que les siècles passaient, ils se rendaient compte de la simplicité de leur univers, et de l'absence de tout sauf eux-mêmes. D'un commun accord, ils commencèrent à Créer. Ils créèrent d'abord les atomes, base indispensable de toute matière. Mais cela ne leur suffisait pas : ils assemblèrent alors les atomes, créant les étoiles et les galaxies que l'on peut observer la nuit, les planètes et les lunes, de la montagne au gravillon en passant par les plus belles pierres précieuses. Bien qu'elles les aient amusés quelques temps, toutes ces créations restaient inanimées.
Alors ils se mirent au travail, et créèrent des formes de vie. Simples au début, mais pourtant encourageantes car animées, puis de plus en plus complexes; ainsi furent créés les animaux et les plantes. Ils étaient si vifs, si animés, si... vivants, que les entités songèrent un instant, à votre échelle des millénaires, à s'en tenir là. Une fois de plus, à cause la passivité de leurs créations qui ne possédaient pas l'intelligence, la curiosité, la volonté de créer l'emportèrent. Le temps des Dieux arriva...
Hélas, je dois vous laisser là. Ma magie est épuisée, je ne peux communiquer plus longtemps. Je reviendrai... Tenez-vous prêts fils et filles d'Elendatryl; des jours sombres approchent..."
- Ainsi finit le premier songe du Conteur, dit le prêtre en refermant l'épais manuscrit. Bonne journée à vous, et puisse le Hérault vous garder, ajouta-t-il en repoussant gentiment mais fermement les jeunes vers la sortie.
- Karrek, toi aussi tu dois sortir, indiqua-t-il à un jeune homme pensif dans un coin de la salle.
- Mais Sen je veux comprendre, dit le jeune homme. Comment a fait le Conteur pour nous parler d'aussi loin? Comment il a pu parler à autant de gens en même temps? s'écria-t-il avec enthousiasme.
Le prêtre regarda le jeune homme. Malgré le fait qu'il fasse partie de l'orphelinat et qu'il aie depuis un moment déjà passé son dixième cycle, une lueur éclairait son regard, une volonté de savoir et de découvrir le monde qui était, semblait-il, inépuisable. Grand et sec, il dégageait une force tranquille d'autant plus impressionante qu'il était très jeune. Ses yeux bleu océan tranchaient au milieu de ses cheveux noir de jais, et donnaient à son visage bien proportionné un charme indéniable.
- Tu as bien du entendre parler de la magie n'est-ce pas?
- Oui, mais personne ne m'a jamais expliqué, dit-il en prenant un air triste. Les gens pensent que les orphelins, et encore plus ceux qui ont dépassé leur dixième cycle ne sont que des bons à rien incapables d'apprendre quoi que ce soit, à part à faire les corvées ménagères et à travailler aux champs.
- Bon, bon, je vais tenter de t'expliquer ça simplement, répondit-il en prenant un air pensif. Hmm, il y a bien cette image que mon vieux professeur donnait toujours de la magie, je pense qu'elle est assez claire et simple pour que tu puisses la comprendre. Imagine qu'un fleuve coule en permanence au milieu de nous...
- Un fleuve? l'interrompit Karrek, mais je ne vois pas d'eau ici!
- Karrek, c'est une image, reprit le prêtre en soupirant, essaie simplement de t'imaginer, et arrête de m'interrompre. Bien, imagine donc un fleuve. Il est large, beaucoup d'eau coule dedans. Chaque personne a dès sa naissance la capacité de détourner un peu de cette eau et de l'utiliser pour lui. Cette eau c'est la magie.
- Ça veut dire que moi aussi je peux utiliser la magie? ne pu s'empêcher de s'exclamer le jeune homme.
- Karrek, qu'est-ce que je t'ai dit à propos de m'interrompre? demanda le professeur improvisé, l'impatience commençant à poindre sur son visage. La prochaine fois je te met à la porte, c'est compris?
- Compris!
- Très bien je reprend alors, dit-il en passant une main fatiguée sur son front. Chaque personne, comme je te disais avant d'être interrompu, ajouta-t-il en lui lançant un regard sévère, peut utiliser la magie. La grande majorité des personnes n'est pas assez puissante pour attirer assez d'eau à elle ou est dans une région qui n'a pas beaucoup de magie - ne m'interrompt pas! Je répondrais à tes questions plus tard. Quand tu combines les deux cas, les gens ont tout juste assez de magie, que le corps utilise pour fonctionner, pour faire leurs tâches quotidiennes. C'est pour ça que dans les grandes villes, la magie est plus puissante, car elles sont bâties autour de points de confluence. Oh, mais attend, tu as vu l'heure? File maintenant, il est tard et tu vas être grondé si tu rentres en retard à l'orphelinat, dit l'homme en le guidant gentiment vers la sortie.
- Mais Sen j'ai plein de questions! répondit en boudant l'orphelin.
- Et bien rendez-vous à la prochaine décade alors, dit-il avec un clin d'œil, je t'en apprendrais plus si tu restes sage.
- Au revoir! s.exclama Karrek en s'éloignant, la tête pleine de questions et de rêves, des étoiles plein les yeux.
Il se retourna une dernière fois en s'éloignant de la petite chapelle trapue, le prêtre le regardant partir d'un air bienveillant.
Le garçon leva les yeux au ciel et, en voyant le ciel déjà assombri par le crépuscule approchant, son cœur se serra. Ten'Do passé, déjà! (NdA : le temps est mesuré selon un système archaïque, en fonction de la position du soleil et de la lune dans le ciel. Ten'Sa = premier quart-jour, aube, Ten'Te = mi-jour, Ten'Do = troisième quart-jour, crépuscule, Ten'Ly = mi-nuit) La chapelle était nichée dans le creux d'une combe verdoyante, juste à côté du lac, et le chemin du retour lui prendrait plus de temps qu'il n'en disposait. Il se mit à courir, les pans de sa chemise en lin flottant au vent derrière lui. En faisant attention à ne pas se prendre les pieds dans les ronces et lierres qui rampaient doucement sur les bords du chemin en terre battue, il filait comme le vent, ses pieds nus à la plante épaisse tambourinant sur le sol en un rythme régulier et agréable. Une impression de liberté l'emplit; il aurait voulu courir ainsi des heures durant, loin des soucis de ce monde et de l'orphelinat.
Après pas loin d'un quart d'heure, il arriva en vue du village, et sarrêta un instant pour le contempler. Velegan était toujours considéré comme un village, malgré la croissance importante qu'il avait connue les 20 derniers cycles. Fini les petites maisons de pêcheurs en chaume, bonjour les maisons imposantes en pierre et en planches. Voir les rues que les éclaireurs commençaient à allumer le rendit joyeux; d'autant plus que le village attendait prochainement l'arrivée des Voyageurs, les commerçants les plus réputés de toutes les Îles Célestes, et se préparait en conséquent : des guirlandes décorées envahissaient les rues, les maisons étaient repeintes, et les plantes et fleurs venaient redonner de la couleur à la ville terne. La seule note dissonante de lensemble était l'orphelinat, sombre manoir qui dominait le village. Autrefois, il était la demeure du seigneur des lieus, Lord Declan, avant que celui ne meure sans héritier. Un envoyé de la Tour était passé faire un état de la situation, avant de déclarer qu'il n'y aurait pas de seigneur désigné, la gestion du village revenant à l'administration de la ville d'Azuli. Le manoir avait été transformé en établissement recueillant les bébés abandonnés.
Karrek se remit à courir, mais cette fois son sentiment de liberté s'était évanoui. Il rentrait à sa prison... Souvent, avec d'autres orphelins, il avait songé à s'échapper. Mais le manoir était sa seule maison, il n'avait personne nul part pour l'accueillir. Quant à rejoindre la ville, ce n'était même pas la peine d'y penser : l'orphelinat rattrapait tous les évadés et les punissait sévèrement, assez pour les dissuader à vie de recommencer; et qu'aurait fait un enfant dans une ville aussi animée pour survivre? Sortant de ses pensées, il se rendit compte qu'il était devant la grille de l'orphelinat. Il cria pour attirer l'attention du gardien, un vieux bougon qui devait avoisiner les cinquante cycles. Celui-ci, comme à son habitude, s'approcha de la grille en trainant des pieds et en faisant cliqueter son trousseau de clefs, en cherchant la bonne.
- Karrek? Mais qu'est-ce que tu fais dehors à cette heure? dit-il d'un air renfrogné.
- Je ne m'étais pas rendu compte de l'heure, j'ai couru aussi vite que je pouvais! Laissez moi rentrer s'il vous plaît, supplia-t-il.
- Hmm, cest contre le règlement, tu le sais. Pas de rentrée après Ten'Do! Quand bien même je te laisserai passer, tu serais puni et tu ne m'attirerais que des ennuis.
- Je vous en prie, dit le garçon avec une lueur de désespoir dans les yeux, vous ne pouvez pas me laisser là! La nuit est difficile et vous savez que la punition sera pire demain. Je n'ose même pas imaginer raconter à la Matrone pourquoi et où j'ai passé la nuit dehors, renchérit-il, un frisson lui parcourant le dos.
- Passé du temps où? demanda un voix glaciale qui le fit sursauter.
- M-Madame, balbutia le gardien, il est arrivé et je n'ai pas voulu le laisser entrer…
- J'ai vu, le coupa-t-elle. Ouvrez la grille et laissez-le rentrer. Lui et moi allons avoir une… petite discussion dans mon bureau, dit-elle en plissant les yeux d'un air méchant.
Le gardien s'exécuta, et laissa passer le jeune homme avec un air de pitié, vite camouflé en se rendant compte que la Matrone l'observait.
- Dépêche-toi d'entrer, marmonna-t-il, des fois qu'il y ait des chiens errants dans le coin.
Karrek suivit la femme jusque dans le manoir en trainant des pieds.
- Plus vite mon garçon, j'ai des choses plus importantes à faire que de m'occuper d'un retardataire, fit-elle avec un air légèrement inquiet qu'elle ne tentait pas de dissimuler, pensant qu'il n'oserait pas la regarder directement.
Ils montèrent les escaliers en roche sculptée, qui menaient à l'étage, demeure du personnel de l'orphelinat. En parcourant les longs couloirs lambrissés, il admira les tapisseries qui, bien que poussiéreuses car leur entretien était jugé inutile, étaient encore magnifique et montrait la richesse du précédent propriétaire. Ses pieds étaient enfouis dans les poils épais des tapis, et il n'arrivait pas à comprendre cette manie absurde qu'ont les adultes et les riches de s'enfermer les pieds dans leurs chaussures.
Ils arrivèrent enfin au bureau et la Matrone le fit entrer dans la pièce, curieusement sobre et dépouillée de tous les apparats qui y étaient présents.
- Reste debout ici, lui indiqua-t-elle en le détaillant.
Elle se dirigea alors vers la porte et la referma en un claquement sinistre de mauvaise augure…
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Chapitre 1
On raconte que jadis, bien avant d'être telle que nous la connaissons aujourd'hui, la Tour des Mille Soupirs était le fief d'une race puissante, des créatures immenses, de notre point de vue, mais néanmoins très évolués. Hauts de cinq mètres selon les uns - hypothèse fort plausible au vu de la taille de leurs constructions - changeformes selon d'autres, capables de contrôler les forces de la nature... leur existence est entourée de mystères. Ces créatures imposantes, nommées les Skandium, seraient également, selon des sources malheureusement imprécises, les bâtisseurs de la capitale du monde civilisé : Jadiel, la cité de cristal. Hélas, à ce jour aucune preuve tangible de l'existence des Skandium n'a été trouvée, à l'exception des constructions démesurées qu'ils ont dispersées au travers des Îles Célestes.
Histoire du Monde, Atascus Mireorbis, cycle 5237 A.E.
"Loin d'ici, dans la contrée reculée de Merthan, terre oubliée des hommes comme des dieux, repose un secret. Au sein des hautes montagnes orifères de l'Aesthis, dans la plus profonde et obscure des grottes, un être est assis dans la posture rituelle de méditation des Mages, un bâton noueux semblable à un serpent dressé devant lui dispense une faible lueur, seule source lumineuse dans la grotte. Le seul bruit de la salle provient de la chute régulière de gouttes d'eau depuis un stalagtite, juste devant l'être androgyne. Son immobilité est d'ailleurs si totale, sa poitrine se soulève d'une manière si imperceptible que l'on pourrait le prendre pour une statue. Puis, dans un mouvement d'une lenteur et d'une fluidité si contrôlée, qu'on ne saurait trouver chez un être humain, il parait reprendre vie, se redressant en position levée, les yeux sans pupilles fixant un point connu de lui seul. La bouche légèrement entrouverte laisse échapper un souffle, qui se mue en tempête, tournoyant dans la pièce, tourbillonant dans la quête d'une sortie.
Les Mots de la créature finissent par trouver une fissure, tout juste assez large pour les laisser passer, remonter et se répandre dans toute l'immensité du Void, chevauchant les courants aériens. Rapidement, ils arrivent aux Îles Célestes, se répandent dans chaque foyer, chaque demeure acceuillant une personne un tant soit peu réceptive à l'Ancienne Magie. Personne, fût-il roi, paysan ou bien mage, ne peut se soustraire à la somnolence puissante qui les envahit soudain. Alors, Il commence à parler.
"Entendez, enfants d'Elendatryl, la voix du Conteur. Entendez la voix de la vérité, la voix de l'Histoire. Il est temps pour vous d'accéder à la connaissance."
"Il y a fort longtemps, bien avant l'Exode, bien avant même que le monde, du moins tel que vous le connaissez ne soit créé, était le Void. Le Void était tout, partout, tout le temps, et il n'existait rien d'autre que lui. Le mal et le bien n'existait pas, car ils ne sont pas Void. Et de ce Void, d'elles-mêmes, surgirent deux forces. Elles n'étaient que pensée, concept, sans aucune existence physique : Avako 'sh, principe d'obscurité, et Fôlhein, principe de lumière. Ni mâle, ni femelle, ni frère, ni sœur, simples contrepoints." Il se tait un instant, dans un silence d'autant plus impressionnant que lorsqu'il parle, sa voix emplissait l'espace et vous donne l'impression d'être assis au coin du feu, un bon livre dans les mains.
"Dans un premier temps, ils se satisfirent de la contemplation du Void et de la découverte de leurs pleines capacités intellectuelles. Mais, au fur et à mesure que les siècles passaient, ils se rendaient compte de la simplicité de leur univers, et de l'absence de tout sauf eux-mêmes. D'un commun accord, ils commencèrent à Créer. Ils créèrent d'abord les atomes, base indispensable de toute matière. Mais cela ne leur suffisait pas : ils assemblèrent alors les atomes, créant les étoiles et les galaxies que l'on peut observer la nuit, les planètes et les lunes, de la montagne au gravillon en passant par les plus belles pierres précieuses. Bien qu'elles les aient amusés quelques temps, toutes ces créations restaient inanimées.
Alors ils se mirent au travail, et créèrent des formes de vie. Simples au début, mais pourtant encourageantes car animées, puis de plus en plus complexes; ainsi furent créés les animaux et les plantes. Ils étaient si vifs, si animés, si... vivants, que les entités songèrent un instant, à votre échelle des millénaires, à s'en tenir là. Une fois de plus, à cause la passivité de leurs créations qui ne possédaient pas l'intelligence, la curiosité, la volonté de créer l'emportèrent. Le temps des Dieux arriva...
Hélas, je dois vous laisser là. Ma magie est épuisée, je ne peux communiquer plus longtemps. Je reviendrai... Tenez-vous prêts fils et filles d'Elendatryl; des jours sombres approchent..."
- Ainsi finit le premier songe du Conteur, dit le prêtre en refermant l'épais manuscrit. Bonne journée à vous, et puisse le Hérault vous garder, ajouta-t-il en repoussant gentiment mais fermement les jeunes vers la sortie.
- Karrek, toi aussi tu dois sortir, indiqua-t-il à un jeune homme pensif dans un coin de la salle.
- Mais Sen je veux comprendre, dit le jeune homme. Comment a fait le Conteur pour nous parler d'aussi loin? Comment il a pu parler à autant de gens en même temps? s'écria-t-il avec enthousiasme.
Le prêtre regarda le jeune homme. Malgré le fait qu'il fasse partie de l'orphelinat et qu'il aie depuis un moment déjà passé son dixième cycle, une lueur éclairait son regard, une volonté de savoir et de découvrir le monde qui était, semblait-il, inépuisable. Grand et sec, il dégageait une force tranquille d'autant plus impressionante qu'il était très jeune. Ses yeux bleu océan tranchaient au milieu de ses cheveux noir de jais, et donnaient à son visage bien proportionné un charme indéniable.
- Tu as bien du entendre parler de la magie n'est-ce pas?
- Oui, mais personne ne m'a jamais expliqué, dit-il en prenant un air triste. Les gens pensent que les orphelins, et encore plus ceux qui ont dépassé leur dixième cycle ne sont que des bons à rien incapables d'apprendre quoi que ce soit, à part à faire les corvées ménagères et à travailler aux champs.
- Bon, bon, je vais tenter de t'expliquer ça simplement, répondit-il en prenant un air pensif. Hmm, il y a bien cette image que mon vieux professeur donnait toujours de la magie, je pense qu'elle est assez claire et simple pour que tu puisses la comprendre. Imagine qu'un fleuve coule en permanence au milieu de nous...
- Un fleuve? l'interrompit Karrek, mais je ne vois pas d'eau ici!
- Karrek, c'est une image, reprit le prêtre en soupirant, essaie simplement de t'imaginer, et arrête de m'interrompre. Bien, imagine donc un fleuve. Il est large, beaucoup d'eau coule dedans. Chaque personne a dès sa naissance la capacité de détourner un peu de cette eau et de l'utiliser pour lui. Cette eau c'est la magie.
- Ça veut dire que moi aussi je peux utiliser la magie? ne pu s'empêcher de s'exclamer le jeune homme.
- Karrek, qu'est-ce que je t'ai dit à propos de m'interrompre? demanda le professeur improvisé, l'impatience commençant à poindre sur son visage. La prochaine fois je te met à la porte, c'est compris?
- Compris!
- Très bien je reprend alors, dit-il en passant une main fatiguée sur son front. Chaque personne, comme je te disais avant d'être interrompu, ajouta-t-il en lui lançant un regard sévère, peut utiliser la magie. La grande majorité des personnes n'est pas assez puissante pour attirer assez d'eau à elle ou est dans une région qui n'a pas beaucoup de magie - ne m'interrompt pas! Je répondrais à tes questions plus tard. Quand tu combines les deux cas, les gens ont tout juste assez de magie, que le corps utilise pour fonctionner, pour faire leurs tâches quotidiennes. C'est pour ça que dans les grandes villes, la magie est plus puissante, car elles sont bâties autour de points de confluence. Oh, mais attend, tu as vu l'heure? File maintenant, il est tard et tu vas être grondé si tu rentres en retard à l'orphelinat, dit l'homme en le guidant gentiment vers la sortie.
- Mais Sen j'ai plein de questions! répondit en boudant l'orphelin.
- Et bien rendez-vous à la prochaine décade alors, dit-il avec un clin d'œil, je t'en apprendrais plus si tu restes sage.
- Au revoir! s.exclama Karrek en s'éloignant, la tête pleine de questions et de rêves, des étoiles plein les yeux.
Il se retourna une dernière fois en s'éloignant de la petite chapelle trapue, le prêtre le regardant partir d'un air bienveillant.
Le garçon leva les yeux au ciel et, en voyant le ciel déjà assombri par le crépuscule approchant, son cœur se serra. Ten'Do passé, déjà! (NdA : le temps est mesuré selon un système archaïque, en fonction de la position du soleil et de la lune dans le ciel. Ten'Sa = premier quart-jour, aube, Ten'Te = mi-jour, Ten'Do = troisième quart-jour, crépuscule, Ten'Ly = mi-nuit) La chapelle était nichée dans le creux d'une combe verdoyante, juste à côté du lac, et le chemin du retour lui prendrait plus de temps qu'il n'en disposait. Il se mit à courir, les pans de sa chemise en lin flottant au vent derrière lui. En faisant attention à ne pas se prendre les pieds dans les ronces et lierres qui rampaient doucement sur les bords du chemin en terre battue, il filait comme le vent, ses pieds nus à la plante épaisse tambourinant sur le sol en un rythme régulier et agréable. Une impression de liberté l'emplit; il aurait voulu courir ainsi des heures durant, loin des soucis de ce monde et de l'orphelinat.
Après pas loin d'un quart d'heure, il arriva en vue du village, et sarrêta un instant pour le contempler. Velegan était toujours considéré comme un village, malgré la croissance importante qu'il avait connue les 20 derniers cycles. Fini les petites maisons de pêcheurs en chaume, bonjour les maisons imposantes en pierre et en planches. Voir les rues que les éclaireurs commençaient à allumer le rendit joyeux; d'autant plus que le village attendait prochainement l'arrivée des Voyageurs, les commerçants les plus réputés de toutes les Îles Célestes, et se préparait en conséquent : des guirlandes décorées envahissaient les rues, les maisons étaient repeintes, et les plantes et fleurs venaient redonner de la couleur à la ville terne. La seule note dissonante de lensemble était l'orphelinat, sombre manoir qui dominait le village. Autrefois, il était la demeure du seigneur des lieus, Lord Declan, avant que celui ne meure sans héritier. Un envoyé de la Tour était passé faire un état de la situation, avant de déclarer qu'il n'y aurait pas de seigneur désigné, la gestion du village revenant à l'administration de la ville d'Azuli. Le manoir avait été transformé en établissement recueillant les bébés abandonnés.
Karrek se remit à courir, mais cette fois son sentiment de liberté s'était évanoui. Il rentrait à sa prison... Souvent, avec d'autres orphelins, il avait songé à s'échapper. Mais le manoir était sa seule maison, il n'avait personne nul part pour l'accueillir. Quant à rejoindre la ville, ce n'était même pas la peine d'y penser : l'orphelinat rattrapait tous les évadés et les punissait sévèrement, assez pour les dissuader à vie de recommencer; et qu'aurait fait un enfant dans une ville aussi animée pour survivre? Sortant de ses pensées, il se rendit compte qu'il était devant la grille de l'orphelinat. Il cria pour attirer l'attention du gardien, un vieux bougon qui devait avoisiner les cinquante cycles. Celui-ci, comme à son habitude, s'approcha de la grille en trainant des pieds et en faisant cliqueter son trousseau de clefs, en cherchant la bonne.
- Karrek? Mais qu'est-ce que tu fais dehors à cette heure? dit-il d'un air renfrogné.
- Je ne m'étais pas rendu compte de l'heure, j'ai couru aussi vite que je pouvais! Laissez moi rentrer s'il vous plaît, supplia-t-il.
- Hmm, cest contre le règlement, tu le sais. Pas de rentrée après Ten'Do! Quand bien même je te laisserai passer, tu serais puni et tu ne m'attirerais que des ennuis.
- Je vous en prie, dit le garçon avec une lueur de désespoir dans les yeux, vous ne pouvez pas me laisser là! La nuit est difficile et vous savez que la punition sera pire demain. Je n'ose même pas imaginer raconter à la Matrone pourquoi et où j'ai passé la nuit dehors, renchérit-il, un frisson lui parcourant le dos.
- Passé du temps où? demanda un voix glaciale qui le fit sursauter.
- M-Madame, balbutia le gardien, il est arrivé et je n'ai pas voulu le laisser entrer…
- J'ai vu, le coupa-t-elle. Ouvrez la grille et laissez-le rentrer. Lui et moi allons avoir une… petite discussion dans mon bureau, dit-elle en plissant les yeux d'un air méchant.
Le gardien s'exécuta, et laissa passer le jeune homme avec un air de pitié, vite camouflé en se rendant compte que la Matrone l'observait.
- Dépêche-toi d'entrer, marmonna-t-il, des fois qu'il y ait des chiens errants dans le coin.
Karrek suivit la femme jusque dans le manoir en trainant des pieds.
- Plus vite mon garçon, j'ai des choses plus importantes à faire que de m'occuper d'un retardataire, fit-elle avec un air légèrement inquiet qu'elle ne tentait pas de dissimuler, pensant qu'il n'oserait pas la regarder directement.
Ils montèrent les escaliers en roche sculptée, qui menaient à l'étage, demeure du personnel de l'orphelinat. En parcourant les longs couloirs lambrissés, il admira les tapisseries qui, bien que poussiéreuses car leur entretien était jugé inutile, étaient encore magnifique et montrait la richesse du précédent propriétaire. Ses pieds étaient enfouis dans les poils épais des tapis, et il n'arrivait pas à comprendre cette manie absurde qu'ont les adultes et les riches de s'enfermer les pieds dans leurs chaussures.
Ils arrivèrent enfin au bureau et la Matrone le fit entrer dans la pièce, curieusement sobre et dépouillée de tous les apparats qui y étaient présents.
- Reste debout ici, lui indiqua-t-elle en le détaillant.
Elle se dirigea alors vers la porte et la referma en un claquement sinistre de mauvaise augure…
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Chapitre 1 (retravaillé)
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