(Dans le cadre du jeu un thème, un artiste ect)
Sobre comme un chameau
Il s'appelait James Pinard. Son grand-père était vigneron, son père caviste et son frère alcoolique. Lui exerçait la profession de commercial pour une marque d'eau minérale. Jamais il n'avait bu une goutte de vin ou d'alcool de toute sa vie. Même durant ses études en Bretagne, c'est dire...James était devenu malgré lui le paria de sa famille.
Son esprit de contradiction s'était manifesté très tôt. Dès la naissance à vrai dire. Alors que ses parents s'attendaient à accueillir une petite fille, James fit une entrée fracassante dans la vie un beau matin de juin, en exhibant fièrement son petit pénis à sa mère qui avait entièrement repeint sa chambre couleur rose champagne.
Deuxième déception quelques mois plus tard. L'apéro, vous vous en doutez, était un moment sacré pour la famille de James. Passés les premiers gazouillis, tous les enfants Pinard avaient fait la fierté de leurs géniteurs en choisissant de prononcer « Tchin » comme premier mot. James se contenta d'un banal « Tata », d'autant plus incompréhensible qu'il n'avait jamais connu sa tante, morte d'une cirrhose trois mois avant sa naissance.
A l'adolescence, il se fit encore remarquer par ses lubies vestimentaires. Il avait décidé qu'il ne porterait pas de jean, le vêtement lui rappelant un peu trop une boisson homophone. Arborant des pantalons en velours, il était la risée de son lycée. James n'était bien entendu jamais invité aux soirées organisées par ses congénères pour qui la fête ne pouvait être folle qu'avec de l'alcool. L'adolescent avait, une fois, eu l'audace d'apporter un pack de Tourtel Twist. On en rigolait encore derrière son dos.
Poussé par ses parents qui ne pouvaient se résigner à ce que sa carrière ne rime ni avec vin ou bière, il commença une formation de sommelier mais s'écroula ivre dans la salle de classe le premier jour. Une dizaine de vins à goûter. C'était trop pour son foie de bébé. Mais cette première journée ne fut pas pour autant une perte de temps car c'est en décuvant qu'il fit la connaissance de sa future femme, Mélissa qui n'était ni métisse, ni d'Ibiza. Mais suffisamment dévêtue pour faire tourner la tête de James qui l'épousa 1 an plus tard du côté de Bordeaux, au milieu des vignes.
Toute la famille sabra le champagne. Sauf James bien entendu. Ses parents lui reconnurent au moins le bon goût d'avoir fait entrer dans la famille une belle-fille aussi pétillante qu'un bon crémant.