Je rajoute ci-dessous, la participation de @Roanna , que j'ai reçu en MP.
- M’man, y‘en a marre ! On arrive bientôt ? ppffff… c’est trop long…
- Oui, mes chéris ! Regardez, c’est là-bas … sur la gauche !
- Pas trop tôt…
Le fameux camping de maman était là, enfin ! Depuis le temps qu’elle leur rebattait les oreilles avec les vacances de ses 17 ans… Elle et sa mère avaient alors décidé de vacances assez sportives, hors des sentiers battus. Leurs vélos enregistrés, elles avaient pris le train un dimanche soir à Besançon direction le midi. Elles étaient arrivées en gare d’Avignon sur le coup de 7 heures du matin. Leur projet: sillonner la région de Montpellier, puis de revenir en bicyclette vers Avignon, par les Alpilles… Un rapide petit-déjeuner pour reprendre des forces et elles avaient enfourché leurs bécanes obsolètes, chargées à bloc de leur tente et sacs à dos. Direction Nîmes, et Viva l’Aventura ! C’était un dimanche. Sur le coup des 11h, le soleil tapait déjà dur. L’asphalte luisante brûlait sous leurs pneus. Un arrêt pour admirer le Pont du Gard et s’hydrater, et les voilà reparties. A Nîmes pourtant, la fatigue les avait rattrapées. Elles avaient craqué pour un petit hôtel bien frais et accueillant aux cyclistes amateurs qu’elles étaient… Repos bienvenu avant de reprendre la route le lendemain, direction Le Grau du Roi !
- Vous pouvez descendre… Je vais nous enregistrer ! Ne vous éloignez pas !
- Allez maman, viens ! Quand est-ce qu’on va se baigner, dis ?
Les deux enfants, Florent, 9 ans, et sa sœur Audrey, 7 ans, trépignaient d’impatience. Voir la mer ! La toucher ! S’y tremper après toutes ces heures de voiture… Le camping avait bien changé. Les dunes elles-mêmes n’étaient plus à leur place d’autrefois. A l’époque, elle et sa mère avaient monté leur petite canadienne dans un creux confortable entre deux dunes… Leur arrivée dans ce camping avait fait sensation ! Deux femmes seules, et en vélo qui plus est, chargées comme des baudets… ce n’était guère habituel ! Leurs voisins étaient sympathiques, des anglais avec lesquels elles avaient tout de suite lié amitié. Eux étaient arrivés la veille en moto, avec des bagages aussi sommaires que les leurs. Pas le choix quand on veut voyager léger. Du coup, ils avaient très vite décidé de faire cuisine commune : elles avaient un mini réchaud à gaz, eux quelques ustensiles dont elles ne s’étaient pas encombrées. L’un d’eux allait faire les courses basiques tandis que les autres cuisinaient, assez sommairement, souvent du poisson fraichement pêché, car pas question de consacrer plus de temps que nécessaire aux repas.
Alan était un jeune homme charmant et Marie avait très vite craqué. Les deux jeunes anglais, pilotes de la Royal Air Force, avaient décidé de parcourir le sud de la France pendant leurs congés. Ils venaient d’arriver au Grau du Roi et pensaient y passer quelques jours de repos. Belle occasion pour Marie de peaufiner son anglais trop scolaire… Assez vite, elle s’était laissée entrainer à des virées en moto au grand dam de sa mère que cela inquiétait un peu… Mais quel plaisir … La vitesse …, cheveux au vent !!! et Alan… un vrai gentleman déguisé en prince charmant !
- Maman, à quoi tu rêves ? ça fait dix fois que je t’appelle et tu ne me réponds pas ! eh !!! oh !!! Reviens vers nous !!
- Excuse-moi ma belle, je pensais à autre chose… La fatigue du voyage, ne t’en fais pas. Alors, que distes-vous de ce coin de paradis ?
L‘endroit en question n’avait décidément plus rien à voir avec celui de ses souvenirs. Le camping s’était beaucoup mosernisé et tout avait changé. Elle s’y était attendue, mais à ce point… waouh… Volatilisé le camping de sa jeunesse. C’était devenu un lieu très confortablement aménagé. De toute évidence, les vacances champêtres n’attiraient plus personne… Elle en éprouva une certaine nostalgie…
- Dis maman, c’est laquelle notre caravane ?
- Celle-là, les enfants. Allez vite y déposer vos affaires et enfiler votre maillot !
Nul besoin d’insister ! tout le monde se précipitait déjà à l’intérieur pour se changer. On verrait le reste plus tard…
Leur caravane était jolie, propre et bien aménagée. Il y avait tout ce dont ils auraient besoin pour passer d’excellents moments en famille. Tout en vidant les bagages, elle ne pouvait s’empêcher de laisser se dérouler le film de ses vacances magiques d’autrefois. Qu’était donc devenu Alan ?
Ils étaient restés longtemps en contact, à distance, et avaient même failli se marier, par deux fois ! Ils s’étaient revus à plusieurs reprises, et Il lui avait fait sa demande quelques années après leur rencontre, mais il aurait fallu que Marie aille s’installer en Angleterre, or sa carrière était tout juste lancée, en France… Après une longue hésitation, elle avait fini par renoncer, avec tous les regrets qui ne manquent pas d’accompagner pareille décision… La seconde fois, quelques années plus tard, il était venu lui rendre visite sans prévenir lors d’une permission : elle était alors en plein divorce – mariage trop rapide qu’elle avait vite regretté, mais dont elle avait eu ses deux précieux enfants. De son côté, Alan venait enfin de trouver une compagne… Il avait longtemps espéré que Marie lui revienne un jour, et voilà qu’au moment où tout redevenait possible, lui venait tout juste de…. Il en avait été malade ! Littéralement ! Ils avaient alors décidé de vraiment se dire adieu, en larmes dans les bras l’un de l’autre… Mais ici, dans ce lieu bardé de souvenirs romantiques… comment en détourner sa pensée ? Ce n’était pourtant pas la raison qui l’avait poussée à ce choix : elle avait envie de revenir sur ses pas, de se retrouver aussi, tout simplement…
Les enfants trépignaient d’impatience. Il était temps d’aller faire trempette : elle imaginait déjà l’eau si délicieuse… Ce bien-être à venir la tentait. Elle laissa tout en plan et prit la direction de la plage.
- Alors qu’est-ce que vous en dites ? Elle est magnifique cette mer si bleue, vous ne trouvez pas ? Et puis, on peut aussi s’éloigner pour être plus tranquilles…
La fraicheur du soir les engagea à aller diner au Grau, sur le port. Certes, il y avait foule, mais peu importait. Il fallait seulement s’assurer de ne pas perdre les petits dans ce tohu-bohu. Elle finit par trouver une table après une longue attente et une agréable ballade autour du port destinée à faire patienter sa petite famille.
- Dis maman, pourquoi tu ne t’es jamais remariée ? Nous, on voudrait bien un papa, tu sais !
- Mais vous avez le votre !
- C’est pas pareil ! On voudrait un papa à la maison. Le nôtre, on ne le voit jamais. Il ne s’occupe pas du tout de nous.
- Je sais mes chéris … Mais ça ne marche pas comme ça, vous savez ! Il faut trouver quelqu’un dont on tombe amoureux… Pas si simple…
- Eh bien nous, on a décidé de te trouver un mari !
- Ah non ! surtout pas ça ! Si un homme m’est destinée, je le trouverai toute seule, croyez-moi. Ne vous en mêlez surtout pas !
- Si, si, si !!!
- Ah non… Pitié !!!! On n’est pas heureux tous les trois ?
Les journées coulaient agréablement ponctuées de baignades et de rires. Les enfants adoraient le club Ecureuil tandis que Marie s’adonnait à des essais de sculpture sur bois. Florent et Audrey s’étaient fait des amis qu’ils amenaient parfois à la caravane où les attendait toujours un jus de fruits frais. Marie les connaissait bien maintenant. En particulier une ravissante petite blondinette aux yeux bleus, Cécile, grande amie de sa fille.
L‘après-midi s’étirait langoureusement. Les deux gamines avaient passé la journée à comploter. Marie était ravie de voir ses enfants prendre du bon temps avec d’autres jeunes de leur âge.
- Maman, Cécile et moi, on voudrait te demander quelque chose. Il faut vraiment que tu acceptes !
- Oui… Mais ça dépend. De quoi s’agit-il ?
- Dis oui d’abord !
- Pas avant de savoir…
-
oh maman !!! Tu aimes bien Cécile, tu me l’as dit.
- Oui, c’est vrai.
- Et le papa de Cécile, il m’aime bien.
- Ah oui ?
- Cécile, elle n’a que son papa. Nous on n’a que toi. Alors, on s’est dit que …peut-être… Et d’ailleurs, Florent, il est d’accord lui aussi !
- D’accord pour quoi ?
- Eh bien, le papa de Cécile et toi, vous devriez passer une soirée et une nuit tous les deux. Alors vous pourriez tomber amoureux et on habiterait tous ensemble ! Ce serait génial !!
Marie ne put s’empêcher d’éclater de rire.
- Mais mes chéris, c’est bien gentil tout ça, mais on ne tombe pas amoureux comme ça !
- Mais si, tu verras. Et puis le papa de Cécile, il est très gentil.
Quand des gamins se sont mis quelque chose en tête, difficile de les faire changer d’idée. Au bout de plusieurs jours de harcèlement et de négociations au sujet de la fameuse nuit, probablement partagés par le papa de Cécile, Marie finit par accepter de le rencontrer autour d’un repas. Les enfants en hurlèrent de joie !
Tout était prêt, la table joliment fleurie et un parfum de rôti qui embaumait l’auvent.
- Les voilà ! Ils arrivent ! hurlèrent en chœur Florent et Audrey.
Marie sortit de la caravane, assez gênée par la situation pour le moins embarrassante. Elle voulait accueillir au mieux le papa de Cécile qui approchait en tenant sa fille par la main. Ils échangèrent alors un regard, muets de stupéfaction.
- Marie ?
- Alan ?